mercredi 11 juin 2014

La chute

La Chute
Stylo

Je me retrouve au même point, toujours la même chose. Il y a des années je recopiais encore et encore les nus des magazines Photo tentant de tracer au crayon la ligne de hanche la plus parfaite, de glisser sur la papier les traits assez brouillés pour que se devine un entre-jambe ou la pointe d'un téton. Essayant de me souvenir des bouts de peau blanche entrevus sur la plage, un regard jeté par dessus un roman, ou deviné à travers les vêtements trop léger et transparent de l'été. Aujourd'hui ce sont des jambes écartés, des croupes tendues, des bas-ventre moelleux et des seins trop dégoulinant de lubricité, mais le crayon est toujours aussi hésitant; les traits sont toujours aussi tremblant et confus. Les formes sont là pourtant, on pourrait presque les toucher, mais il faut une infinie concentration pour les rappeler au papier. Il y a l'odeur et le goût poivré, le bruissement des draps, le bruit des vêtements qui touchent le sol et les respirations qui s'accélèrent. La douceur laisse place aux aspérités, les creux et l'humidité naissante. Tout cela dégringole et s’emmêle dans des grimaces cérébrales et il n'en ressort qu'un vide sidéral, et l'envie de rien, même pas de se branler. Aucune chute ne vaudra la chute des reins et certains souvenirs demandent encore à être vécus.

La Roche des Arnauds, 30/05/2014

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