jeudi 1 avril 2010

Escargot

Raquettes Guery 4

J'ai l'impression de mettre des années à faire les choses. J'ai mis des années à remplir ce carnet, sans prendre particulièrement soins de choisir ce que j'y mettais, j'ai mis des mois a remplir ma première pellicule 36 poses, mois auxquels ce sont ajoutés de nombreux autres avant de la tirer et des semaines pour développer 5 photos. J'ai mis peut-être un ans à me décider à prendre des Polaroïds, et encore plusieurs mois pour m'acheter des films à partir du moment où j'ai trouvé mon appareil en brocante. J'ai mis des semaines avant de commencer à barbouiller des aquarelles, semaines qui se seraient transformées en mois si l'on ne m'avais pas forcé la main à coup de cadeaux. Je ne sais pas si la lenteur est une qualité, si elle permet la maturation des idées ou favorise leur dilution dans un processus inconscient de procrastination, mais j'ai l'impression d'avoir été forgé par elle. Aussi longtemps que je puisse me souvenir j'ai toujours été lent. En primaire je mettais une éternité à remplir mes lignes d'écriture, à tels point que je devais les terminer pendant les récréations. Cette éternité faisait cependant figure de seconde en face du temps mis pour écrire mes rédactions de 15 lignes. Sans parler des heures passées pour apprendre un quatrain d'une poésie. Je traînais ma flegme sur les bancs d'école mais aussi en société. Je voyais courir mes camarades courir après la vie et ses expériences frissonnantes, et tandis qu'eux multipliaient leurs copains, embrassaient leur première amoureuse, moi comme à mon habitude, voyant le fossé se creuser entre eux et moi, attrapais nonchalamment une pelle et me mettais à l'ouvrage pour prêter main forte à mon isolement. Je crois que la seule chose pour laquelle je n'ai jamais été rapide est pour baisser les bras.

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